Depuis 2014, 3 500 hommes de l’armée française luttent contre la reconstitution d’un sanctuaire jihadiste au Sahel. Comment contrôler un territoire vaste comme l’Europe avec 3 500 hommes ? C’est le dilemme de l’opération «Barkhane».
L’immensité du terrain est en soi un défi. «Après Serval [l’intervention française pour chasser les jihadistes des villes du Nord-Mali, début 2013, ndlr], les groupes armés terroristes se sont dilués dans le désert. On a dû s’adapter, explique le général Patrick Bréthous, qui commande l’opération depuis le quartier général basé à N’Djaména (Tchad). Dans la culture nomade, il n’y a pas de frontière. On devait nous aussi passer à un mode d’action transfrontalier.» Depuis deux ans, Barkhane est donc déployée sur cinq pays (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad) et travaille étroitement avec les armées nationales pour empêcher la reconstitution d’un sanctuaire jihadiste au Sahel.
Les drones et les avions français quadrillent inlassablement le désert pour repérer la moindre tentative de regroupement des katibas d’Al-Qaeda. Au sol, les blindés sillonnent les zones reculées pour occuper le terrain et «couper les flux» d’approvisionnement des groupes armés (lire ci-contre). «C’est le principe des compagnies méharistes, explique le lieutenant-colonel qui dirige le Centre d’opérations interarmées, le lieu où toutes les sorties des militaires français sont suivies en direct. Il ne faut surtout pas s’enfermer dans son fortin. On doit être mobiles. Le but, c’est d’être imprévisibles. On cherche la confrontation.»
Les affrontements directs sont pourtant devenus extrêmement rares : Barkhane est maintenant aux prises avec un fantôme. Les jihadistes ne s’attaquent plus frontalement aux soldats français, trop forts pour eux. Au Mali, ils visent plutôt les convois des Nations unies (le mandat de la Minusma prévoit le déploiement de 13 200 Casques bleus), ou les check-points de l’armée malienne (7 300 hommes). Seuls les engins explosifs improvisés rappellent leur présence hostile aux militaires de Barkhane. Le 12 avril, trois soldats – Damien Noblet, Michael Chauwin et Mickaël Poo-Sing – ont été tués en sautant sur une mine.
SOURCE libération