Investi pour un cinquième mandat de cinq ans, le président tchadien Idriss Déby Itno a appelé à l’unité nationale et annoncé de grands projets pour faire du Tchad un pays émergent.
Dans son discours d’investiture, M. Deby a tendu la main à ses opposants, les appelant à ne faire « aucune surenchère politicienne » et à un dialogue politique dont il n’a pas précisé les contours.
« C’est le temps de la concorde nationale et de l’engagement patriotique », a martelé le président Deby, avant d’appeler tous ses compatriotes à « conjuguer leurs énergies positives dans la construction d’une nation où chacun aura sa place ».
« J’aurai besoin de toutes les Tchadiennes et de tous les Tchadiens pour conduire avec succès la difficile mais exaltante mission que vous m’aviez confiée », a-t-il insisté.
Pour son nouveau quinquennat, le président réélu s’est fixé trois priorités pour faire du Tchad un pays émergent : l’amélioration de la qualité de vie de ses concitoyens, la mise en valeur des ressources humaines et la diversification de l’économie.
Premier chantier : le social. Ces cinq dernières années, d’importantes infrastructures sanitaires et scolaires ont été réalisées à travers tout le pays.
Le président tchadien veut maintenir cet effort pour parvenir à offrir une couverture sanitaire universelle pour tous les Tchadiens.
Il entend également élargir la couverture en eau potable de 53% à 83% au moins dans les cinq prochaines années.
Autre promesse en matière d’infrastructures : construire 3.000 km de routes bitumées (autant a été réalisé pendant ces dix dernières années), accélérer la réalisation de son « grand chantier du quinquennat » : la construction d’un réseau ferroviaire pour relier le Tchad au Soudan, au Cameroun et au Nigeria.
Abordant sa deuxième grande priorité, M. Deby veut faire des jeunes et des femmes les maillons principaux du développement de son pays.
Il veut donner à la femme tchadienne (qui représente plus de 52% de la population) « sa place » dans la société et dans les instances de prise de décision.
Aux jeunes, il a affirmé comprendre les angoisses et incertitudes qui les habitent.
« J’ai conscience de vos espoirs déçus », a-t-il insisté, leur promettant une éducation et une formation de qualité.
Il a également fait un clin d’œil à ses compatriotes de l’étranger, annonçant l’élection de leurs représentants dans la prochaine Assemblée nationale.
Troisième chantier : la relance et la diversification de l’économie.
Depuis la découverte et l’exploitation du pétrole au début des années 2000, l’économie tchadienne est devenue tributaire des ressources générées par cette manne. L’or noir a eu un effet d’entraînement positif sur les autres secteurs de l’économie, qui s’est traduit par une forte croissance du PIB non pétrolier depuis 2005.
Malgré ces avancées, l’éventuelle baisse de la production pétrolière couplée à l’instabilité des cours mondiaux du pétrole placent le Tchad dans une position fragile, rendant primordiale la mise en œuvre d’une politique de diversification économique engagée depuis quelques années, s’appuyant sur les piliers naturels que sont l’élevage et l’agriculture.
Ces deux secteurs, qui occupent 80% de la population, disposent pourtant d’une large marge d’exploitation au regard d’importantes potentialités et de leur niveau de développement respectif.
« Le salut ne viendra jamais des ressources pétrolières », a réaffirmé le président qui prône un retour à la terre et à l’élevage.
Il mise également sur l’exploitation de nombreuses potentialités minières dont regorge son pays. Un inventaire de ces richesses géologiques et minières est en cours, confié au Bureau de recherches géologiques et minières de France.
Pour relancer l’économie, le gouvernement tchadien travaille, par ailleurs, à améliorer le climat des affaires. Il mise, enfin, sur un vaste programme énergétique : diversifier les sources et accroître la capacité pour rendre l’électricité disponible et abordable à un grand nombre.
Sur la question de la bonne gouvernance, M. Deby a prôné la rigueur et la transparence dans la gestion des ressources publiques, et une réduction du train de vie de l’Etat dans des proportions supportables. Il a promis une « lutte implacable » contre les toutes les formes de prévarication et de crimes économiques. « A bon entendeur, salut ! », a-t-il lancé devant une assistance silencieuse.
« Le moment est venu de faire une évaluation de notre modèle institutionnel actuel », a poursuivi le chef de l’Etat. Il a précisé que son nouveau quinquennat sera marqué du sceau de la réforme des institutions, notamment la justice, les forces de défense et de sécurité, et l’administration publique qui comptait 60.000 agents civils et 60.000 militaires en 2011.
Le 9 février dernier, en déclarant sa candidature à la présidentielle, il promettait déjà une large concertation nationale pour faire ce diagnostic et apporter les améliorations nécessaires. La réforme de l’Etat « sera la tâche du prochain gouvernement », a-t-il ajouté, avant d’ajouter que « le dernier mot sera au peuple », sans préciser s’il s’agira d’une consultation populaire ou d’un vote par l’Assemblée nationale.
La politique de décentralisation au Tchad a été jusqu’ici handicapée par une certaine instabilité institutionnelle, malgré les réelles avancées que constituent l’organisation réussie en 2012 des premières élections communales et l’adoption des textes organiques relatives à la décentralisation.
Président en exercice de l’Union africaine, le chef de l’Etat tchadien a exhorté ses pairs du continent à maintenir leur solidarité active dans la lutte contre « l’obscurantisme barbare ». Il a promis de poursuivre sa diplomatie panafricaniste, de combattre le terrorisme partout où il représente une menace pour son pays.
Une quinzaine de chefs d’Etat et de gouvernement africains étaient présents à l’investiture de leur homologue tchadien.
SOURCE AFP