En 2014, le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad ont décidé d’œuvrer ensemble en faveur de la sécurité et du développement du Sahel.
Le G5Sahel est un groupe de cinq pays portés par une forte volonté politique qui trouve son ancrage dans un socle culturel commun et dans les aspirations des populations. Cette jeune institution est mue par de grandes ambitions : répondre aux aspirations des populations, traduire en actes la résolution des gouvernements, faciliter la coopération avec les partenaires internationaux. L’année qui s’achève marque un tournant dans la récente histoire de notre organisation.
En 2017, nous avons obtenu la reconnaissance de la Force Conjointe du G5Sahel – par l’Union Africaine (13 avril) puis les Nations Unies (Conseil de sécurité du 21 juin). Cette année, les dépenses militaires de nos États s’élevaient à 1,2 milliard de dollars (SIPRI).
Début 2018, nous avons lancé un vaste effort de mobilisation de ressources domestiques et internationales. Lors de Conférence internationale de haut niveau sur le Sahel (23 février 2018, Bruxelles), les promesses de financement des bailleurs s’élevaient à 414 millions d’euros.
Afin de renforcer la coordination au sein du G5S, nous avons créé un fonds fiduciaire hébergé par la Banque Centrale de Mauritanie. Il a successivement reçu les contributions du Rwanda, de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et des Emirats arabes unis.
Les promesses tardent à se matérialiser et nous devons accroître notre financement : à partir de 2019, chaque Etat allouera désormais la somme de 13 milliards de FCFA/an à l’effort de sécurité régionale.,Cet investissement trouve sa place dans un contexte socio-économique difficile – dont nous sommes parfaitement conscients.
Nous mesurons les ravages causés par le sous-emploi, la conjoncture climatique et savons que dynamisme démographique et mobilité sont à la fois des défis et des opportunités.
Nous organisons donc une rencontre internationale pour financer le développement de notre région. Composée de 40 projets d’un montant de près de 2 milliards d’euros, la première phase du Programme d’Investissements Prioritaires (PIP) s’échelonne de 2019 à 2021.
Les Etats membres ont sécurisé 13% de l’objectif de la levée de fonds dont les axes stratégiques sont gouvernance (81m €), résilience (200m €), sécurité (396m €) et infrastructures (1 milliard €). Les populations ciblées vivent (ou sont réfugiées) dans les régions frontalières des fuseaux Ouest (Mali – Mauritanie), Centre (Burkina Faso- Mali- Niger) et Est (Niger-Tchad) du G5S.
Les interventions du PIP veulent améliorer de façon tangible les conditions de vie de nos « compatriotes » sahéliens. Partout où c’est possible, il faut accroître au plus vite l’accès aux services de l’Etat lorsqu’ils sont insuffisants. Il s’agit d’eau.
Le temps est précieux, inexorable et si long, pour qui attend la conversion de promesses en actes. Fort de ce constat, en juillet dernier, le G5S a décidé le lancement rapide d’une action à fort impact. Devenu « Programme de développement d’urgence », financé par l’Alliance Sahel, cet effort cible trois domaines d’intervention : l’hydraulique, la gestion des conflits intercommunautaires et la sécurité intérieure.
Les zones concernées sont notamment le nord du Burkina Faso, la région du Centre (Mali), la région des Hodh (Mauritanie), la région Nord Tillabéry/ouest Tahoua (Niger) et la région du Kanem et du Lac Tchad (Tchad).
Nous veillerons à ce que la mise en œuvre de cette initiative soit couronnée de succès. Cela impliquera notamment un recours aux compétences et au savoir-faire des acteurs sahéliens. Plus que l’effet économique attendu, il convient de préparer la pérennité de la dynamique initiée.
Alors que l’année touche à son terme, une nouvelle dynamique prend forme. Eprouvée par l’attaque de son quartier général de Sévaré (29 juin), la Force Conjointe a gagné Bamako où elle poursuit méthodiquement sa montée en gamme sous la responsabilité conjointe du Général Hanane Ould Sidi (Mauritanie) et de son adjoint, le général Oumar Bikimo (Tchad).
Le soutien politique n’a jamais été aussi fort – tant au niveau de l’Union africaine que du Conseil des sécurité – qui lui a consacré une session d’information le 12 novembre dernier. La Force Conjointe a agi en dépit de sérieux défis : insuffisances en matière d’équipements, défaillances au niveau de la logistique, manque de financement.
En effet, les fuseaux ouest, centre et est du G5S ont connu neuf opérations dont Haw Bi, Pagnali, Ir go ka, Gourma, Odossou et El Emel. Elles visaient à rassurer les citoyens vivant dans des zones sujettes aux activités criminelles de groupes armés. Toutefois, il reste d’importants progrès à faire pour protéger les civils et instaurer un climat de confiance entre forces de sécurité et de défense et populations.
Nous en sommes conscients et redoublerons d’efforts. La prospérité et la concorde sont les meilleures auxiliaires de la stabilité – quand elles n’en sont pas à l’origine. Une partie des ressources que nous cherchons sont en nous : il s’agit de notre socle culturel partagé.
Tirons parti de notre ingénierie sociale pour approfondir l’intégration régionale des peuples sur laquelle se fonde notre union. Donnons-lui plus de force et de pertinence ! C’est notre conviction et c’est ce que nous faisons, cette semaine, en progressant vers l’application d’une résolution de notre dernier Conseil des ministres (30 octobre – Niamey). Objectif : la suppression des frais d’itinérance dans l’espace G5S d’ici un an !
Issoufou Mahamadou, Président de la République du Niger
Président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat du G5 Sahel
Source Financial Afrik –