« D’importants progrès ont été accomplis pour renforcer la présence des femmes dans la police et réduire les disparités et les discriminations en matière de genre par les pays du G5 Sahel, mais beaucoup reste à faire. »
Auteure d’une étude sur l’état des lieux femmes dans les institutions de police des pays du G5 SAHEL, Oumou Warr, consultante pour la GIZ nous fait part de ses observations.
– Quel est l’objet de l’étude ?
– L’objet de l’étude était de faire un état des lieux dans les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) sur la présence des femmes en uniforme, leurs rôles et responsabilités. Il s’agissait de relever les principaux obstacles dans le recrutement, la rétention et le déploiement des femmes sur le terrain.
L’objectif final est d’élaborer conjointement avec les forces de police nationales un plan d’action intégrant la dimension de genre afin renforcer la présence des femmes au sein de la police.
– Quel sont les points saillants de cette étude ?
D’importants progrès ont été accomplis pour renforcer la présence des femmes dans la police et réduire les disparités et les discriminations en matière de genre par les pays du G5 Sahel, mais beaucoup reste à faire. En effet, selon les données et les informations collectées le nombre de femmes fonctionnaires de Police reste faible dans la région, même si de plus en plus de femmes intègrent la police. Les effectifs de femmes dans la police, tout grade confondu, représentent entre 8% et 9 % de l’effectif total dans les pays de la région sauf au Mali, où il atteint 17,8%. Les femmes sont majoritairement sous gradés, et peu occupent des postes à haute responsabilité. Ces chiffres peuvent s’expliquer par certains préjugés et pesanteurs sociales, comme la faible éducation des filles, le mariage précoce, l’analphabétisme, et que les métiers de la police ont longtemps été considérés comme des domaines réservés à la seule population masculine et non conforment au rôle que l’on attribue aux femmes dans la société. Ces défis ont un impact sur les femmes désireuses de rejoindre les FDS, et sur celles déjà engagées. Or, la participation des femmes en plus de celle des hommes est une nécessité opérationnelle et stratégique dans la lutte contre l’insécurité. Les femmes sont parmi les acteurs principaux du renforcement des relations de confiance entre populations et FDS ainsi que de la paix et de la cohésion sociale. De plus, disposer d’agents de police femmes, permet par exemple aux femmes, qui pour des raisons culturelles, n’ont pas l’habitude de traiter avec les hommes, d’avoir accès aux services de la police.
Les femmes consultées pointent du doigt, en plus des défis d’ordre culturels, des défis liés à leur condition de travail, tels que l’’absence d’installations sanitaires différenciés pour le personnel féminin et masculin, et le manque de confiance qu’on leur accorde.
Il ressort également des entretiens menés que les femmes sont perçues comme n’ayant pas assez confiance en elles et ne désirant pas se mettre en avant afin d’obtenir des postes.
De manière générale, les législations nationales et les textes de la police des pays du G5 Sahel ne contiennent pas de restrictions majeures pour l’intégration des femmes dans la police. Mais, il n’existe pas non plus de nombreuses dispositions encourageant la présence des femmes. On peut citer quelques dispositions mises en œuvre pour remédier aux écarts de genre, tels que, le recrutement spécial de femmes de façon systématique au Burkina, et de façon ponctuel en Mauritanie et au Tchad. Egalement l’existence de tests physiques différentiés pour les hommes et les femmes lors des concours dans tous les pays du G5 Sahel sauf en Mauritanie.
– Quels sont les bénéficiaires de cette étude ?
Les bénéficiaires sont les institutions de police, les écoles de police et le Secrétariat Exécutif du G5 Sahel.
– Pouvez-vous nous citer les principales recommandations effectuées à l’issue de l’étude ?
Les principales recommandations pour renforcer la présence des femmes au sein de la police sont les suivantes :
- Établir une stratégie genre au sein de la police qui s’aligne à la Stratégie nationale du genre
- Intégrer la dimension genre dans la formation des policiers pour une meilleure rétention et un meilleur avancement du personnel féminin
- Élaborer une stratégie de sensibilisation pour contrevenir aux obstacles socio-culturels
- Élaborer une stratégie de communication à destination de tout public en montrant des femmes dans la police pour inspirer la population et particulièrement les jeunes filles à se lancer dans ces métiers
- Concevoir des programmes de tutorat avec des plans de carrières , et organiser des formations de développement personnel spécifiquement pour les femmes, pour mieux les outiller et renforcer leurs capacités
- Veiller à ce que les équipements et la logistique répondent aux besoins des hommes et des femmes, en particulier les installations sanitaires, les lieux de vie, et les uniformes ;