Son prénom Khalia devait la prédestiner à se tenir loin des gens. Un prénom qui signifie en arabe celle qui est chère. Autrement dit, celle qui est rare. Loin des gens. Raté. Khalia Annadif (KA) est le contraire. Elle aime les gens. Elle les aide. Elle les soutient. Portrait d’une altruiste viscérale.
Du haut de sa jeune trentaine, KA trace vaille que vaille son chemin. Plusieurs causes guident ses actions. Sa philosophie de vie se résume à : prendre soins des autres. Elle a comme devise, presque inscrit sur son visage illuminé d’un sourire ravageur, « au nom des autres ». « Pour moi, c’est un sacerdoce. J’ai toujours aimé aider les gens. Cela depuis ma tendre enfance ». Rien pourtant ne l’y oblige.
Issue de la grande famille Annadif et fille ainée de l’ex-ministre tchadien des Affaires Etrangères Mahamat Saleh Annadif (MSA), n’insistez pas, elle n’aime pas qu’on dise « fille de… », KA a un parcours bien rempli. D’abord, elle décroche son baccalauréat Série G2 en 1999 au Lycée Technique Commerciale de N’Djamena avec, tenez-vous bien, la mention : très bien. Ensuite, elle poursuit ses études supérieures pour le couronner d’une Maitrise en gestion de Hec-Tchad. Présentement, elle est Secrétaire General de la Ligue des Femmes Oulémas et Prédicatrices (LFOP) du Tchad. Elle a aussi été désignée par le Ministère de l’administration du territoire membre de la Cellule d’Antenne Régionale pour la prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent. Elle est aussi membre de l’Union internationale des femmes musulmanes (UIFM).
Les années 2000 marquent les premiers pas de sa vie professionnelle. Elle est recrutée comme stagiaire à la prestigieuse Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC). Confirmée à ce poste convoité, elle refuse l’offre se sentant un peu à l’étroit. Ensuite, elle est intégrée au Ministère des Finances et du Budget, à la Direction du Trésor public. Pas à l ‘aise dans ce milieu non plus. Elle décide de prendre du recul. De Réfléchir. « Les Banques. Les Finances. La Trésorerie. Je n’ai rien contre. Ce n’est juste pas mon truc. Moi c’est le contact aves les gens qui m’intéresse. Les oubliés. Les nécessiteux », assène t’elle. Lorsqu’elle aborde ce sujet, la timidité cède la place à la passion des autres. Pourtant, au premier contact, on pense être en face d’une grande timide. Non. KA est une fausse timide. Douce. Enjouée. Souriante. Elle se déchaine. Argumente. Explique le sens de son engagement.
Depuis 6 ans, elle préside son ONG qu’elle a baptisé SARI’OU. Un nom qui signifie « secourir ». « La mission de mon Ong est comme je ne cesse de le dire : aider les autres. Les plus démunis de la société tchadienne. Sans distinction : hommes, femmes, enfants ». Féministe dans son style propre, elle défend les droits des femmes au Bien-Etre. Et compte, dans les jours avenirs, engagée son organisation dans un partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) sur l’Autonomisation des Femmes et des jeunes filles, sur les conséquences du mariage précoce etc. Toujours avec l’UNFPA, elle milite pour l’espacement des naissances (Planning familiale). Combattante des causes féminines, son esprit bouillonne de milles et un projets. Tous sociaux. Tous destinés aux faibles. Aux oubliés. KA veut vivre dans une société harmonieuse. Où chaque tchadien, chaque tchadienne ne se sente ni exclu. Ni rejeté. Ni marginalisé. Sa générosité, elle le tient de sa maman. Son engagement à servir les autres, lui vient de son papa. Quand elle évoque ses parents, l’émotion la submerge. Elle se ressaisit. Et dit, « je suis heureuse d’avoir des parents comme eux. Ils m’ont toujours soutenu. Je tiens à leur rendre hommage ».
Lorsqu’on lui demande si elle n’est pas une politicienne hors du jeu de la politique active ? Elle prend un grand souffle pour dire non. Hésite. Et lâche « Hum ! si aider les autres en faisant ce que je fais, c’est faire de la politique, alors oui je fais de la politique ».
Fervente musulmane, la foi chevillée au corps, ouverte sur le monde, elle agrément ses fins de phrases par cette formule religieuse dont les tchadiens ont le secret : « Al hamdou lil la. InchAllah. ». Avant l’Amour des autres, elle place l’Amour de Dieu en haut de liste. C’est ce que, dit-elle, fertilise son amour des autres. Croyante sans verser dans les extrêmes, elle est adepte d’un l’islam de tolérance. Un islam du juste milieu. « On a de la chance de vivre dans un pays comme le Tchad où diverses croyances cohabitent sans problèmes. Dans le respect ».
Retour sur la politique : KA insiste pour répéter qu’elle ne fait pas de la politique. D’aucune manière. « Je suis une travailleuse sociale. Oui, une travailleuse sociale. C’est la qualification juste » dit-elle avec force. Et la politique active, ça vous intéresse ? Comme foudroyée par cette question, KA reste silencieuse quelques secondes. Regarde à travers la fenêtre. Cherche ses mots. Se reprend. Ajuste sa chaise. Et d’une voix douce, a peine audible, comme pour ne pas laisser ses détracte urs l’entendre. « Hum…enfin c’est dur la politique. Non ? ». Un grand sourire illumine son visage. « Je ne sais pas. ». Et rajoute, « au fond pourquoi pas ? Enfin…peut-être…un jour. Qui sait de quoi sera fait demain ? », dit celle qui un jour sera, peut-être, l’héritière politique de son père MSA.
Mahamat Moussa Sardaouna Tchad infos