Message du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, à l’occasion du Sommet du G5 Sahel qui se tient à Nouakchott, en Mauritanie, ce 30 juin:
Permettez-moi de commencer par exprimer toute ma solidarité avec les pays et les peuples du Sahel.
La situation dans la région demeure l’une des priorités et préoccupations majeures de l’Organisation des Nations Unies.
Le Sahel a déjà trop souffert. Depuis quelques mois, la pandémie du COVID-19 vient s’ajouter aux risques liés au changement climatique, à la précarité économique et à la dégradation continue de la situation sécuritaire.
L’accès limité aux services sociaux de base et l’absence de perspectives socio-économiques pour la majorité de la population, notamment les jeunes et les femmes, aggravent une situation humanitaire déjà extrêmement fragile
Les attaques contre les civils augmentent, y compris parmi les personnes déplacées internes et les réfugiés. Nous assistons également à l’apparition de clivages ethniques et à une aggravation de la violence intercommunautaire, avec parfois l’implication de certains membres des forces de sécurité nationale.
La violence intercommunautaire au centre du Mali reste particulièrement inquiétante.
La MINUSMA appuie pleinement le gouvernement du Mali dans la mise en œuvre de sa stratégie pour la stabilisation du Centre. A cette fin, la mission poursuit son plan d’adaptation et a transféré, avec l’autorisation du Conseil de sécurité, des ressources afin de protéger les civils au centre du pays. Ces mesures commencent à porter leurs fruits et la présence accrue des casques bleus dans cette région a eu un effet dissuasif vis-à-vis des groupes armés.
Au-delà, la MINUSMA continue de soutenir la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger. En dépit de nombreux retards et défis, certains progrès récents méritent d’être soulignés, notamment le redéploiement d’unités reconstituées dans le nord du Mali – une première depuis 2014.
Par ailleurs, également au nord du pays, les parties signataires se sont engagées à accroître la participation des femmes dans le processus de paix et à rendre opérationnelle une zone de développement durable.
Une fois de plus, ces avancées ont notamment été rendues possibles grâce au soutien de la MINUSMA, et je souhaite saisir cette occasion pour féliciter mon Représentant spécial, M. Mahamat Saleh Annadif, et toutes les équipes sous sa direction, pour leurs efforts inlassables.
Cependant, pour faire face aux nombreuses urgences, la Mission doit être mieux équipée et a besoin du soutien continu des contributeurs de troupes et des États membres.
Je sais que les pays de la région, qui sont les premiers à subir de plein fouet les effets de cette crise, sont pleinement mobilisés, et le G5 Sahel en est une illustration. La montée en puissance du Groupe et de sa Force conjointe est encourageante et nous devons continuer de les appuyer.
Le strict respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme dans la conduite des opérations militaires est absolument essentiel. Nous devons gagner la bataille de l’exemplarité et donner tous les gages d’appui aux populations qui subissent les attaques des terroristes et groupes radicaux.
Si l’appropriation et la responsabilité de chaque État est essentielle, les causes profondes de l’instabilité sont bien souvent de nature régionale et transfrontalière.
La pauvreté, l’insécurité alimentaire, les déficits de gouvernance, l’absence de l’autorité de l’État dans les régions les plus reculées, le changement climatique et l’impunité sont des facteurs qui se renforcent mutuellement, exacerbant les tensions et alimentant les discours de haine des groupes terroristes.
L’ampleur de la crise requiert donc une action collective et concertée.
La solidarité et la mobilisation internationale sont primordiales. Je me réjouis du lancement de la Coalition pour le Sahel et du Partenariat pour la sécurité et la stabilité – deux initiatives qui peuvent changer la donne et créer un cadre qui facilite la collaboration entre tous les acteurs régionaux et internationaux.
Je salue les mécanismes de coordination accrus avec le G5 Sahel que se propose de mettre en place la Coalition. Je continue de plaider pour que les forces africaines d’imposition de la paix et de lutte contre le terrorisme aient un mandat robuste sous chapitre VII de la Charte des Nations Unies et un financement pérenne et prévisible, garanti par les contributions statutaires.
Permettez-moi également de souligner l’importance de l’engagement des autres partenaires régionaux. Je souhaiterais à ce titre saluer l’initiative de la CEDEAO de travailler en étroite coopération avec le G5 Sahel dans le cadre de la mise en place d’une stratégie de lutte contre le terrorisme incluant les États côtiers, ainsi que la décision de l’Union africaine de déployer 3000 soldats dans la région. L’ONU soutient pleinement les efforts de l’Union africaine dans le cadre de son architecture de paix et sécurité en Afrique.
La mobilisation de la communauté internationale doit être globale et s’inscrire sur le long terme. Nous devons soutenir les États de la région dans leurs efforts sécuritaires, de développement et de respect des droits humains.
Dans ce contexte, je voudrais réitérer mes appels pour un cessez-le-feu mondial ainsi que pour une réponse humanitaire globale. Je voudrais également renouveler mon appel à la communauté internationale à prendre des mesures pour alléger le fardeau de la dette des pays du G5 Sahel.
Cela représenterait un engagement important pour limiter les effets dévastateurs de la pandémie du COVID-19 et renforcer leur capacité à faire face aux multiples défis auxquels ils sont confrontés.
Dans le cadre global de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et de son plan d’appui, nous redoublons d’efforts. Mon Représentant spécial pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Mohamed Chambas, ainsi que nos équipes pays sont pleinement mobilisés pour soutenir les efforts nationaux contre le COVID-19 et pour accompagner, ensemble, les pays du Sahel sur la voie de la paix, de la stabilité et du développement durable.